Bernd and Hilla Becher sont deux photographes allemands dont le travail témoigne de façon systématique du paysage industriel de leur pays et sert de base pour une école de photographie contemporaine. Leurs photos en noir et blanc rendent compte des vestiges architecturaux qui disparaissent, par exemple des châteaux d’eau, des silos à grain, des réservoirs de carburants, et sont le fondement de leur style.
De 1961 à 1994, les Becher produisent des séries de représentations d’architectures industrielles : après la Ruhr et les Pays-Bas des débuts, ils étendent leurs investigations à toute l’Europe du Nord-Ouest et même aux États-Unis. Selon un principe d’inventaire, ils réalisent des photographies en noir et blanc sur un mode toujours identique : les objets sont placés au milieu de
l’image ; ils sont pris à partir d’un point surélevé, souvent un échafaudage installé à cet effet ; la lumière est la plus constante possible et les photographies sont prises quand le soleil est au zénith. Le but recherché est d’obtenir des photographies objectives, centrées sur la chose représentée, qui fassent apparaître clairement la nature des objets et tous leurs détails. Les types de classement des photographies déterminent des accrochages en séries : châteaux d’eau, silos, haut-fourneaux, maisons, gazomètres, chevalets. Très loin du surréalisme, ces images possèdent pourtant leur part d’irréalité par l’atmosphère d’obsolescence et d’abandon que dégagent l’absence de toute présence humaine et d’activité industrielle en cours, le noir et blanc et la sérialité uniformisante. La photographie est inséparable d’un point de vue historique et scientifique sur les sites représentés : le livre Hauts-fourneaux (1990) associe ainsi aux 223 photographies deux textes sur le fonctionnement et l’histoire des hauts-fourneaux.